En matière de bail d’habitation, le locataire est tenu de deux principales obligations : celle de régler son loyer et celle « d’user de la chose louée raisonnablement ». Cette obligation d’usage raisonnable, prévue par l’article 1728 du code civil, oblige le preneur à ne pas dégrader le local loué, et est très souvent reprise au sein des différents baux d’habitation. Les baux peuvent également venir préciser ladite obligation en fonction des spécificités du local loué, des types de travaux que le propriétaire entend imputer au locataire et de l’état dans lequel doit être restitué le local.

Le contrat de bail ne peut généralement point anticiper et chiffrer, par avance, le montant qui serait dû par le preneur en cas de dégradation. Lors de la restitution des lieux loués par le locataire, le bailleur peut solliciter le paiement des potentielles réparations locatives, à l’appui de devis notamment.  Lors de désaccord entre le bailleur et le preneur, quant au montant ou à la nature des désordres constatés, le propriétaire est contraint de saisir la juridiction compétente aux fins de faire constater lesdits désordres, souvent par le biais d’une mesure d’expertise judiciaire, et de chiffrer le montant du préjudice subi par le bailleur.

La procédure d’injonction de payer est une procédure judiciaire simplifiée et rapide, initiée par une requête du demandeur, qui permet au créancier d’obtenir le paiement d’une dette sans passer par une assignation au fond. Ladite procédure peut être utilisée pour les dettes issues d’un contrat, dont le montant est déterminé et qui sont exigibles et non contestées. Si le juge ayant à connaître de la requête estime que la demande est fondée, il rend une ordonnance portant injonction de payer, sans convoquer les parties lors d’une audience. Même si le débiteur dispose du droit d’opposition à compter de la signification de l’ordonnance, cette procédure est simplifiée pour le créancier et moins onéreuse.

Au sein d’un arrêt du 27 mars 2025 n°23-21.501, la troisième chambre civile de la cour de cassation est venue affirmer que la procédure d’injonction de payer est inapplicable au recouvrement d’une créance née de dégradations locatives. En effet, alors même qu’un juge avait accueilli la demande d’un assureur ayant indemnisé le propriétaire au titre des dégradations subies, subrogé dans les droits du propriétaire du local loué pour la réparation des dégradations locatives, la cour de cassation est venue casser cette décision rendue en dernier ressort. La troisième chambre civile a considéré que l’évaluation n’étant pas stipulée contractuellement, la procédure d’injonction de payer ne pouvait trouver application. Cette décision peut paraitre critiquable puisque les réparations locatives naissent du non-respect d’une obligation contractuelle.

Même s’il s’agissait en l’espèce d’un bail d’habitation, cette règle peut également s’appliquer aux baux commerciaux.