On se souviendra que la loi sur la modernisation du marché du travail du 25 juin 2008 avait introduit un nouveau mode de rupture du contrat de travail : la rupture conventionnelle, ce qui constituait une avancée remarquablement novatrice pour les acteurs du monde du travail.
Ce nouveau mode de rupture était réclamé depuis longtemps par les partenaires sociaux et surtout par les praticiens de droit social, afin de mettre un terme à la pratique, parfois critiquable et incertaine, des transactions signées dans le cadre de licenciements négociés.
Il s’agissait d’une avancée majeure, permettant au salarié qui ne souhaitait pas démissionner, un droit au chômage et était une source de sécurité juridique pour les parties, évitant les risques de contestations contentieuses de la transaction, puisque la rupture conventionnelle est subordonnée à l’homologation de l’inspection du travail, ce qui lui confère une force certaine.
Or, en prévision du vote du budget 2026, le Gouvernement, animé d’une volonté d’économies tous azimuts, est tenté de la supprimer et va à tout le moins proposer de durcir les conditions d’accès à la rupture conventionnelle, sans doute par un différé allongé pour percevoir le chômage ou par la limitation de la rupture à certains profils de salariés, invoquant, pour justifier sa démarche, des démissions déguisées.
Pourtant, la rupture conventionnelle est non seulement profitable aux salariés, mais également à l’employeur : pas de préavis, pas ou peu de remise en cause après l’homologation, une évidente célérité et surtout un apaisement des relations. Le débat sur un abus de la rupture conventionnelle qui serait soit une démission déguisée, soit un licenciement maquillé, n’est pas pertinent. En effet, l’esprit du texte de la rupture conventionnelle était d’introduire une autre forme de rupture que le licenciement ou la démission et de permettre à l’employeur et au salarié de s’accorder sur une rupture amiable, ce qui n’est pas critiquable et bien dans l’esprit de résolution amiable des litiges, promu par ce même législateur pour d’autres litiges depuis des années, ce qui rend bien contradictoire sa démarche actuelle.
Il ne saurait être question d’abus des recours à la rupture conventionnelle alors que les salariés et les employeurs ne font que rompre légalement le contrat de travail par un mode de rupture prévu par la loi. Or, si les ruptures conventionnelles sont importantes et augmentent chaque année, les démissions et les licenciements sont toujours plus nombreux que la rupture conventionnelle. De plus, l’exécutif méconnait manifestement l’existence du différé des allocations chômage, déjà en place pour les ruptures conventionnelles lorsqu’une indemnité supra-légale a été convenue entre les parties.
Rajouter un second différé, s’apparentant à une sanction sur le choix de la rupture conventionnelle, serait injuste et contre-productif.
Il serait regrettable de remettre en cause la rupture conventionnelle, qui n’aurait pour effet que de remettre au gout du jour les licenciements arrangés, ce qui ne serait qu’un retour en arrière bien regrettable et inutile, puisque dès lors l’objectif d’économies ne serait pas atteint.
Espérons que les débats parlementaires permettront de mettre en exergue ces évidences.