Un arrêt de la Deuxième Chambre civile de la Cour de cassation du 8 févier 2024 ( Civ.2ème 8 fev. 2024 n°22-14.528 et n°23-17.744) publié au Bulletin conforte la position de cette même chambre prise dans un arrêt du 29 juin 2023 ( Civ.2ème, 29 juin 2023 n°21-23. 440) lequel n’avait pas eu les honneurs d’une publication au Bulletin.

L’interruption de la prescription de l’action du créancier disposant d’un acte notarié contenant prêt constituant un titre exécutoire constatant sa créance après recevabilité de la demande de surendettement de son débiteur après déchéance du terme est affirmée avec force.

Le principe posé est le suivant :

« Vu l’article L. 331-3-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 1013-672 du 26 juillet 2013 :

Il résulte de ce texte que la décision de recevabilité de la demande de traitement de la situation de surendettement emporte suspension et interdiction des procédures d’exécution diligentées à l’encontre des biens du débiteur.

Pour constater la prescription de la créance de la banque en recouvrement de sommes dues au titre d’un prêt notarié, le jugement relève qu’au regard d’une déchéance du terme intervenue en janvier 2013, la prescription quinquennale était acquise en janvier 2018, à défaut de fait interruptif se déduisant de la procédure de surendettement.

En statuant ainsi, alors que le créancier qui recherche l’exécution d’un titre notarié ne peut, à compter de la décision de recevabilité du débiteur au bénéfice de la procédure de surendettement des particuliers, interrompre la prescription en diligentant une procédure d’exécution et qu’il ne saurait lui être imposé d’introduire une action au fond afin de suspendre la prescription, le tribunal a violé le texte susvisé. »

 

Certes le principe n’est pas totalement nouveau, la même chambre de la Cour de cassation avait rendu un arrêt le 28 juin 2018 aux termes duquel elle avait reconnu que la recevabilité d’une demande d’admission au bénéfice d’une procédure de surendettement, qui emporte suspension et interdiction des procédures d’exécution diligentées à l’encontre des biens du débiteur, met le créancier dans l’impossibilité d’agir en sorte que la prescription se trouve suspendue le temps de cette période de recevabilité au sens de l’article 2234 du code civil (Civ. 2ème , 28 juin 2018, n° 17-17.481, FS – P + B), mais le présent arrêt est remarquable en ce qu’il ne trouve pas son fondement sur l’article 2334 du Code civil, mais bien uniquement dans le droit spécial du surendettement.

Ce dernier se suffisant à lui-même pour fonder l’empêchement à agir du créancier, et n’a pas à craindre les conditions strictes de l’article 2234 du code civil.

Il est rendu sous l’ancien article L 331-1 alinea 1 du code de la consommation, lequel a été repris à droit constant lors de la réforme du code de la consommation devenu l’article L 722-2 dudit code. Précision étant apportée que le code de la consommation vise désormais que lorsque, en suite de la décision de recevabilité du dossier du débiteur surendetté, ce dernier demande la mise en place de mesures recommandées ou imposées par la commission, après constat de l’échec de la phase amiable, le délai de forclusion et/ou de prescription est interrompu selon l’article. L. 721-5.

 

Par cet arrêt est réaffirmée la portée de l’acte notarié qui comporte formule exécutoire dont le créancier n’a pas à en perdre le bénéfice par une action au fond pour interrompre une prescription.

Demeure la question de savoir à quel moment va reprendre le cours de la prescription ? Nous savons que cette question est complexe tant les textes font naître une certaine incohérence.

La suspension des mesures d’exécution ou leur interdiction sont selon les cas, jusqu’à l’approbation du plan conventionnel de redressement, jusqu’à la décision imposant les mesures prévues aux articles L. 733-1, L. 733-4, L. 733-7 et L. 741-1 du code de la consommation, jusqu’au jugement prononçant un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ou jusqu’au jugement d’ouverture d’une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire. En tout état de cause, ces suspensions et interdictions ne peuvent excéder 2 ans.

Le créancier doit ainsi demeurer vigilant.