Par Amadou Diallo – Juriste d’affaires
Bien souvent, pour des raisons de simplification et de pragmatisme, il est courant au sein des SARL de petite ou moyenne taille de se passer partiellement ou totalement de la procédure d’agrément prévue par le Code de commerce, dans le cadre de la cession de parts sociales.
Généralement, dans ce type de sociétés, les associés se contentent de convoquer une assemblée générale et d’approuver la cession des parts sociales. Les liens personnels entre associés est de nature à les inciter à se passer d’une étape pourtant aussi importante que l’approbation de la cession : il s’agit de l’obligation de notification du projet de cession à la société et aux associés.
Or, les juridictions exigent de veiller au respect du formalisme exigé par l’article L223- 14 du Code de Commerce.
Eleom Avocat revient pour vous sur cette obligation.
L’obligation de notification du projet de cession
La cession de parts sociales au profit d’un tiers étranger à la société est soumise à une procédure d’agrément.
L’article L 223-14 du Code de commerce décrit la procédure d’agrément en ces termes : « Lorsque la société comporte plus d’un associé, le projet de cession est notifié à la société et à chacun des associés.»
L’article R223-11 du code de commerce précise que la notification du projet de cession est faite par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
Le dernier alinéa de l’article L223-14 précise que toute disposition contraire à l’article L223-14 est réputée non écrite. Par conséquent, les statuts ne peuvent déroger à ce formalisme.
Lorsqu’une cession de parts sociales intervient en violation de la procédure d’agrément, la sanction est la nullité.
Si la sanction du non-respect de la procédure ne soulève pas de difficultés particulières, la question est de savoir s’il est admis un formalisme de substitution ou par équivalent ou une confirmation implicite.
L’absence de formalisme par équivalent et de confirmation implicite
La chambre commerciale de la Cour de cassation (Cass. Com, 14 avril 2021, n° 19-16. 468) a rappelé que l’article L223-14 du Code de commerce est d’ordre public et qu’il « convient de respecter scrupuleusement le formalisme légal, aucune confirmation implicite de la cession ne pouvant faire échec à l’annulation d’une cession effectuée en violation de ce formalisme… ».
Il découle de cette solution que le vice affectant la cession de parts sociales d’une SARL ne peut être régularisé par un formalisme par équivalent. La convocation des associés à une assemblée générale avec pour ordre du jour l’agrément des cessions ne saurait faire échec à l’annulation d’une cession intervenue en méconnaissance des dispositions de l’article L223-14 du Code de commerce.
Aussi, il a été jugé que le non-respect du formalisme légal ne saurait être régularisé par :
– l’intervention de l’associé lors de la signature de l’acte de cession (Cass. com. 9-5-1990 n° 87-14.375 P : Bull. civ. IV n° 145) ;
– le consentement de la majorité des associés représentant au moins les trois quarts des parts sociales donné dans un acte annexé à celui de la cession (CA Paris 26-2-1992, 15e ch. A : RJDA 5/92 n° 467) ;
– le consentement de l’associé donné antérieurement ou postérieurement à la cession (CA Montpellier 4-11-2008 n° 07-5368, 2e ch. : RJDA 11/09 n° 970).
Toutefois, la régularisation de l’absence de notification du projet de cession à la société et aux associés peut intervenir par une confirmation explicite. En effet, la Cour de Cassation refuse uniquement la confirmation implicite. Il en résulte donc une possibilité de confirmation explicite. A notre sens, pour procéder à la confirmation explicite, l’assemblée générale des associés appelée à statuer sur la demande d’agrément, réunies dans des conditions régulières, doit dans une résolution :
– prendre acte que le projet de cession des parts sociales n’a pas été notifié à la société et aux associés dans les formes prévues par la loi ;
-décider que la présence des associés couvre le vice de forme résultant de l’absence de notification.
A toutes fins utiles, il est rappelé que la notification du projet de cession, plus précisément la dernière notification, fait courir le délai de trois mois à l’issu duquel l’absence de réponse de la Société équivaut à son consentement à la cession.
Une question en droit sociétés ? N’hésitez pas à nous contacter en remplissant le formulaire de contact ci-dessous.